Cette année encore, et ce, peut-être plus que les années précédentes, nous avons été confronté à un problème majeur pour certains colombophiles. La perte massive de pigeonneaux, que ce soit au toit, où plus souvent, lors des premiers entrainements.
Certains amateurs ayant pu perdre parfois plus de la moitié de leurs jeunes durant cet été. Je ne vais bien sûr malheureusement pas vous donner la solution miracle pour ne plus perdre aucun pigeonneau, mais il est pas contre intéressant d’essayer de trouver des pistes pour diminuer ces pertes.
Tout d’abord, interrogeons nous sur la raison de ces pertes. En fait, il n’y a bien sûr pas « une raison » mais plusieurs raisons.
La malchance
Tout d’abord il y a la malchance. Paramètre qu’aucun vétérinaire ne peut contrôler et qui peut toucher tout le monde sans distinction. Un mauvais concours avec perte massive chez tous les amateurs, suite à un mauvais lâcher.
Un entrainement qui tourne mal où l’on se rend compte que juste après avoir lâché les pigeons, qu’une horde de pigeons passe juste au dessus de chez vous et emporte les pigeonneaux sur plusieurs dizaines de kilomètres, et il ne reste plus qu’à prier et compter les pigeons qui rentrent au compte goutte.
Mais justement, est-ce juste de la malchance ? Un pigeonneau entrainé à 30 km de chez lui par un autre groupe de pigeons, ne devrait il pas pouvoir au final s’en rendre compte et pouvoir parcourir le chemin inverse pour rentrer ?
Pourquoi alors également certains amateurs me disent avoir été lâcher une vingtaine de fois leurs jeunes, à 20 endroits différents, et me disent se retrouver en fin de saison encore avec leurs 128 de le 130 pigeonneaux initiaux, alors que d’autres m’avouent avoir perdu en 3 entrainement plus de 60% de leur jeunes ? Ceci serait juste de la malchance ?
En fait, cette question est une très bonne question, et une question dont la réponse est très complexe. En effet, beaucoup de chercheurs s’attellent à essayer d’y répondre. Et au jour d’aujourd’hui, nous sommes très loin d’en connaitre toutes les raisons précises.
Néanmoins, des observations et des tendances se détachent. En effet, même s’il existera toujours une part de chance ou de malchance due aux événements expliqués plus haut, on remarque que d’autres paramètres favorisent la perte de ces pigeonneaux.
Un des facteurs clef que nous savons maintenant c’est qu’il y a plusieurs facteurs, certains contrôlables, d’autres non qui jouent un rôle dans ce problème.
Un des phénomènes dont le nom est assez récent est de plus en plus cité comme un des responsables des pertes de pigeons, mais également de mauvais résultats dans les concours de pigeonneaux.
Ce problème est un syndrôme que l’on surnomme le « syndrôme de la maladie des jeunes pigeons » traduction de l’anglais « Young pigeons disease syndrome » (YPDS). Ce syndrôme est actuellement pointés du doigt comme un des principaux coupable de la perte de nos pigeonnaux.
Essayons de décortiquer de façon simple ce que peut être ce problème.
Un « syndrôme » est un ensemble de symptômes, causés dans ce cas ci par un ensemble de pathologies. Il s’agit donc du nom donné aux maladies qui touchent plus spécifiquement les pigeonneaux et qui peuvent le toucher soit seuls, mais beaucoup plus souvent le touchent ensemble. Le pigeon n’est pas atteint d’un problème, mais de plusieurs problèmes qui profitent l’un l’autre de la présence de l’autre (qui affaiblit donc le pigeon) pour se développer également.
Les agents responsables de ces « attaques groupées et coordonnées »
Si ceci n’est pas très clair, j’essaierais de vous donner des exemples un peu plus loin.
Mais quels sont les agents qui sont donc responsables de ces « attaques groupées et coordonnées » ?
il y a bien sûr ceux que tout le monde parmi vous connaissent. La trichomonose, la coccidiose, « le coryza » (terme qui ne veut en soit rien dire de façon scientifique, mais ceci est un autre débat),.. mais il y a surtout ceux que l’on connait moins, et qui sont beaucoup plus pernicieux.
Je pense par exemple à certains virus qui ont pour action « d’attaquer le système immunitaire des pigeonneaux » et donc de diminuer sa résistance naturelle face aux autres maladies, comme celles citées plus haut. A cause de la présence de ce virus, le pigeon n’a plus l’occasion de lutter par sa propre immunité contre la trichomonose par exemple, et s’en retrouve constamment envahi.
Une immunité faible est également l’assurance que les vaccinations réalisées à ce moment là ne permettront pas la mis en place d’une protection efficace (cfr le premier article sur les poquette).
Enfin un troisième type de problème intervient dans ce syndrôme, l’utilisation massive d’antibiotique de façon anarchique, excessive et arbitraire, qui lui aussi provoque invariablement, non seulement le développement de bactéries résistantes aux antibiotiques, mais en plus également une diminution de l’immunité du pigeons qui est mis « sous bulle » à cause de ces antibiotiques et qui provoque donc une faiblesse de la propre immunité du pigeon.
Mais alors, que peut-on faire ? Voila la question qui découle logiquement de ce qui est écrit plus haut. Pour répondre à cette question, il faut savoir un peu plus à quel ennemi on a à faire, et essayer de voir comment on peut lutter contre chacun d’entre eux.
3 ennemis moins connu par les colombophiles
Si l’on ne reviendra pas sur les problèmes plus connus comme la trichomonose, etc.. déjà décrit plus haut, on peut par contre s’attarder sur 3 ennemis beaucoup moins connu par les colombophiles.
– Tout d’abord le Circovirus. Des études récentes réalisées sur des pigeonniers de plusieurs pays, ont mis en évidence la présence de ce circovirus dans plus de 50% des pigeonniers européens.
Ce virus a la particularité de toucher principalement les jeunes pigeons, et a entre autre parmi ses conséquences de provoquer une baisse sensible de l’immunité du pigeon. Le temps que le pigeonneau réussisse à lutter contre le virus, il se retrouve pour avec un système de défense naturel défectueux.
Laissant ainsi la place à de nombreux autres ennemi de venir attaquer le pigeon et provoquer d’autres problèmes (tricho, coccidiose, vers, diverses bactéries respiratoires ou plus générales comme les staphylocoques, colibacille, des chlamydias (ornithose), … Il est donc facile à comprendre que durant cette période le jeune est excessivement sensible à toutes ces pathologies, qui sont autant de cause d’augmentation du risque de pertes.
– L’herpesvirus. Celui-ci commence à être un peu plus connu, car les vétérinaires le mentionnent de plus en plus aux colombophiles. L’herpesvirus est un virus qui possède plusieurs particularités. Chez le pigeon, ses cibles préférées sont les gorges ainsi que les voies respiratoires. Il est donc un des agent possible de ce qu’on appelle grossièrement le « coryza ».
Coryza oui, mais attention choryza viral (c’est-à-dire coryza qui ne se soignera pas à l’aide d’antibiotiques, et encore moins à l’aide de cocktails d’antibiotiques de toutes sortent comme le reçoivent parfois les pigeons). Les antibiotiques, qui même s’ils peuvent dans ce cas, éviter l’apparition de surinfection du problème par des bactéries, ont plus souvent comme résultat d’affaiblir encore un peu plus le pigeonneau, car ils constituent un stress supplémentaire pour lui).
Hors l’herpes virus, tout le monde le connait chez l’homme… il s’agit du bouton de fièvre. Bouton de fièvre qui réapparait tout au cours de la vie, à chaque fois qu’un stress, ou que la fatigue se fait trop présente.
Pour le pigeon, c’est pareil… chez le jeune, cet herpesvirus va provoquer à lui seul un vrai « coryza » avec des symptômes respiratoires, des nez sales, ainsi que des petites membranes jaunâtres dans la bouche, pouvant parfois être confondues avec de la diphtérie. Il provoquera donc également des potentielles surinfections par des bactéries.
Et certains vétérinaires le considèrent de plus en plus comme un agent très important parmi les causes de pertes des pigeonneaux. Et si comme cela n’était pas suffisant, à l’instar du bouton de fièvre, le pigeon reste porteur de ce virus toute sa vie, et il pourra en cas de fatigue et de stress (concours trop difficile,..) refaire une petite poussée d’Herpesvirus, moins importante que lors de la contamination en tant que jeune, car le vieux pigeon est plus résistant, mais suffisant pour excréter le virus et devenir contagieux, et pour provoquer de façon transitoire des baisses de formes accompagnées de baisse de résultats (ceci étant également un autre débat).
On considère également que près de 30% des pigeonniers sont porteurs de ce problème.
– L’utilisation massive d’antibiotique. On en a déjà parlé, la colombophilie est le milieu au monde où l’on distribue le plus d’antibiotiques à tort et à travers. Je ne redévelopperais pas ce sujet, mais rappellerais simplement que chaque fois que vous distribuez un antibiotique, vous pouvez bien sûr lutter contre un potentiel problème bactérien, mais vous tuez également toutes les bonnes bactéries dont le pigeon à besoin, en laissant la place vide pour un nouvel envahissement de bactérie (bonnes ou mauvaises), affaiblissez le pigeon et notamment son foie et son système immunitaire.
Et je ne peux pas rappeler à certain qu’un traitement antibiotique « préventif » est en médecine la plus grosse absurdité qu’il soit. Qui parmi vous se met à prendre des antibiotiques en se disant que la semaine prochaine il aura un rendez-vous important et qu’il veut être sûr de ne pas tomber malade ? C’est clair… Personne.
La raison est qu’en plus d’être une idée stupide, cela ne sert strictement à rien, car 2 jours après avoir terminé l’antibiotique, si vous devez être contact avec un germe, vous tomberez malade quand même. Pourquoi donc le faire sur nos pigeons ? Beaucoup trop de colombophiles continuent à utiliser des antibiotiques à tort et à travers, et même sans améliorations de résultats s’entêtent dans cette voie,… (bref, parenthèse terminée).
Comment les éviter ?
Donc nous connaissons maintenant un peu mieux «certains des agents » qui participent à ce phénomène de pertes massives de pigeonneaux. La question qui nous vient ensuite c’est comment les éviter ?
Le point 3 et l’utilisation abusive d’antibiotique pourrait paraitre la plus simple à gérer. Vous me direz, c’est simple, il suffit d’arrêter d’en donner. Malheureusement, ce n’est pas si simple. Et à l’instar d’un fumeur qui ne peux pas arrêter de fumer du jour au lendemain sans ressentir des symptômes de manque.
Le colombophile qui a habitué sa souche de pigeon à l’utilisation d’antibiotiques massive (et donc à mis depuis des années ses pigeons dans une « bulle » contre les bactéries), a également sélectionné, en faisant cela, une souche de pigeon presque « dépendante » des antibiotiques, car il n’a plus sélectionné ses pigeons entre autre sur leur résistance. Il se retrouve donc avec une souche de pigeons qui souvent sont des pigeons avec une propre immunité déficiente.
Et s’il arrête les antibiotiques réguliers en période de concours, les pigeons se retrouveront sans défense (car n’ayant plus leur propres défense), et attraperont effectivement tout ce qui peut trainer dans les paniers. A l’opposé, j’ai certains colombophiles dans ma clientèle, champions dans leur domaine qui à l’inverse ont pris un autre chemin, et réalisent des saisons extraordinaires sans donner le moindre médicament… même pas le moindre traitement tricho pendant la saison), si certains vous diront cela vous ne les croirez pas.
Mais étant leur vétérinaire, je peux vous assurer que c’est le cas. A l’inverse, ces colombophiles, sans traiter, ont sélectionné leurs pigeons, non seulement sur les résultats, mais aussi sur leur résistance aux maladies… Résultats seuls les plus résistants, ne tombaient pas malade, faisaient des prix, et étaient gardé et mis plus tard à la reproduction.
Bien sûr ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, si ce n’est pas votre cas, ne décidez pas de passer de tout à rien du jour au lendemain, car la seule conséquence que cela aura est que vous vous prendrez des « casquettes/brosses/dérouillées » à chaque concours. La seule solution, est d’y arriver peu à peu, en travaillant d’une façon intelligente, et progressive.
Le point 2, soit l’herpes virus est considéré comme un des principaux problème de la colombophile actuel. La bonne nouvelle est qu’il existe maintenant un vaccin contre cette maladie.
Je l’utilise dans ma clientèle depuis 2 ans, et j’ai pu remarquer (comme d’autres vétérinaires) qu’en moyenne, les pigeonniers dont les jeunes sont vaccinés subissent moins de perte de pigeonneaux que les autres. Avec même des résultats très surprenant chez certains amateurs qui avaient l’habitude d’élever 100 jeunes en espérant en avoir toujours une 50aine pour l’année suivante, qui se sont retrouvé avec 98 pigeonneaux à la sortie du mois de septembre après avoir vacciné leurs pigeonneaux contre l’herpes en début d’année.
Ce qui à nouveau nous pousse à penser que cet herpesvirus a un réel effet dans les pertes de pigeonneaux. Le point positif, c’est qu’en plus le vaccin est très peu cher, 16 euros pour 50 doses, et que le même vaccin vaccine également contre la paramyxovirose. Le côté un peu moins positif est qu’il est nécessaire de vacciner 2 fois à 1 mois d’intervalle les pigeonneaux la première année.
Ce qui n’est plus le cas les années suivantes, où un seul rappel annuel est nécessaire. Attention à nouveau ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, c’est-à-dire qu’en vaccinant contre l’herpesvirose on ne perdra plus aucun pigeonneaux. Comme expliqué au début il s’agit juste d’une des cause, et la vaccination n’empêchera pas vos pigeon de croiser un groupe de pigeons hollandais à l’entrainement leur de leur 1ère volée ou d’attraper d’autres maladies…
Le point 1 est plus embêtant, car il n’existe actuellement aucun vaccin contre le circovirus. La seule solution pour lutter contre celui-ci est d’essayer de stimuler la propre immunité du pigeon pour espérer qu’il arrive par lui-même à passer au dessus de la maladie le plus vite possible.
Pour cela, une alimentation équilibrée, et des compléments alimentaires comme certaines vitamines (dont la vitamine A ou C) par exemple ainsi que la sélection de pigeons avec une immunité forte sont nos seuls moyens de défense actuellement. (Mais les sujets alimentation et compléments alimentaires arriveront une prochaine fois).
Je pourrais également vous parler d’autres raisons (rappelez vous le problème est « multifactoriel »), comme un trop grand nombre de pigeons dans un trop petit espace, pas assez d’aération dans le pigeonnier des jeunes,…) mais cet article est déjà assez long comme cela je trouve, et à nouveau nous pourront en rediscuter dans un prochain article.
J’espère avoir réussi à vous informer à nouveau un peu plus sur ce problème d’actualité.